Entraînez constamment votre mémoire! Exigez d’elle beaucoup de travail et elle s’améliorera de plus en plus! Fixez-vous pour objectif d’accomplir chaque jour un exercice rituel: reproduire avec exactitude un poème ou le contenu d’un article de journal, par exemple.
Avant tout, un orateur moderne doit avoir ce que la science appelle une mémoire orientée. Des faits, des citations, des pensées personnelles, etc. peuvent être consigner immédiatement par écrit; on soulage ainsi sa mémoire. Mais des questions comme celles qui suivent concernent la mémoire orientée: où puis-je trouver la littérature spécialisée? Où ai-je déjà entendu une certaine thèse? Quelle était l’opinion de Dupont il y a trois ans? Etc. Pour la discussion et la négociation, une mémoire qui fonctionne bien est encore plus nécessaire que pour le discours. C’est en effet justement dans ce domaine qu’il faut pouvoir « puiser dans la masse » à la vitesse de l’éclair. Une connaissance toujours mise à jour des détails et des relations fait souvent pencher la balance en votre faveur.
La mémoire est traitée comme si elle n’appartenait pas vraiment à notre personne, comme si elle était un don particulier dont la possession est certes agréable, mais dont on n’est pas responsable des défauts. Si un apprentissage par cœur purement mécanique est stupide et ne demeure en outre que fugacement à la surface de la mémoire, les défauts de la mémoire peuvent être vaincus avant tout par la combinaison de trois moyens :
- la concentration (qui augmente aussi la capacité de faire impression);
- l’association d’idées (qui crée des ponts parmi les choses mémorisées);
- la répétition.
Toute concentration est conditionnée par trois choses: a) le grand intérêt intime, et la capacité b) de se fermer aux pensées secondaires et c) aux événements extérieurs environnant. Puisqu’on retient facilement ce qui nous intéresse vraiment, il faudra faire un plus grand effort de concentration pour ce qui nous passionne moins.
Chacun doit trouver la meilleure façon de s’exercer en fonction de nature propre:
- Certains, comme Napoléon, ont une disposition plutôt kinesthésique: l’Empereur, qui avait peut-être la meilleure mémoire des noms de son temps, écrivait trois fois chaque nouveau nom et jetait ensuite le papier. – Prendre des notes est toujours une bonne stratégie!
- L’homme plus acoustique doit apprendre à voix haute: il doit pouvoir entendre ce qu’il apprend.
- Pour les personnes visuelles, une disposition habile des mots-clés (en les soulignant avec des couleurs spécifiques, en utilisant des images et schémas, etc.) aide à la mémorisation.
Quel que soit votre type, se concentrer signifie avant tout: observer et réfléchir à l’objet d’apprentissage de manière approfondie et en y consacrant beaucoup de temps. Il vaut mieux apprendre moins de choses à la fois, mais en profondeur!
James a dit un jour : « Notre esprit n’est rien d’autre qu’une machine à associer ». La conclusion pour l’orateur est la suivante: il faut se créer des ponts de mémoire. Si vous avez déterminé une suite d’idées, vous mémorisez les mots-clés ou les phrases-clés par association, en les reliant par des images (loi psychologique de l’association locale). Il est toujours décisif de relier ce que l’on vient d’apprendre à des connaissances déjà profondément ancrées.
Finalement, rien ne s’oublie complètement! Des « traces » subsistent de tout apprentissage. En fait, il ne faut pas se demander: « Comment renforcer ma mémoire? », mais: « Comment éviter l’oubli? »! La répétition est un moyen mnémotechnique nécessaire qui ne doit pas être utilisé de manière mécanique.
Voici trois petits conseils pratiques pour renforcer sa mémoire:
- Lire à haute voix pour mieux assimiler la matière (combinaison de la vue et de l’ouïe). Ne prenez que de petites parties pour la répétition; elles en seront d’autant mieux mémorisées!
- Faites une pause pendant la répétition (« pause créative »!). Il est par exemple beaucoup plus efficace de mémoriser une matière pendant une heure sur deux jours que pendant deux heures sur un jour, car entretemps le subconscient continue à fixer la matière.
- La psychologie expérimentale (d’Ebbinghaus et autres) montre qu’une partie de tout ce qui est appris est très vite oubliée, mais que l’oubli se fait ensuite plus lentement. En conséquence, il est préférable de commencer assez tôt à répéter.
- Et considérons encore une chose: de nombreuses personnes ont une mauvaise mémoire uniquement parce qu’elles exercent leur mémoire au mauvais moment, c’est-à-dire lorsqu’elles sont physiquement fatiguée.
- Outre la simple répétition, la répétition combinée est importante. On retient mal une somme de détails, mais on retient bien mieux les connaissances qui sont intégrées dans des contextes toujours nouveaux. Relions autant que possible différents domaines entre eux.
Dans la pratique, comment l’orateur doit-il donc faire usage de sa mémoire? Il ne devrait pas apprendre par cœur le texte du discours (tout au plus le début et la fin), mais seulement le plan de base, noté sous forme de mots-clés. Il devrait cependant mémoriser très précisément les relations (chaînes de causalité) et les contours du sens. Si l’on s’est entêté à réciter le discours par cœur, le risque de rompre le fil à la moindre contrariété est permanent. En outre, le « débobinage » du discours ne permet pas de conserver l’élément de fraîcheur et de spontanéité qui ne peut être préservé qu’en renouvelant sans cesse les mots.