1.4.1. Théorie de l’évolution et alchimie

Moi aussi, j’ai été un arbre ou un buisson,

Un jeune homme ou une jeune fille

Et dans la mer un poisson muet.

Empédocle [frdgmt 117]

[66] Nous devons aujourd’hui poursuivre nos réflexions sur l’arcane suprême de l’astrologie — le zodiaque — que  nous avons déjà reconnu la dernière fois comme le siège des forces qui guident l’évolution de l’Homme sur Terre, et en particulier sa sortie du stade animal vers le stade humain proprement dit, le quatrième dans l’échelle des stades organiques de la vie sur cette Terre.

Nous avons ainsi appris à connaître le zodiaque comme une sorte de champ de force spirituel à partir duquel l’action globale d’entités subtiles rayonne sur la Terre, y imprimant leur trace, tout comme la trace de l’Homme se manifeste dans son cercle d’action sur la Terre: une sorte de « projection organique » divine dont l’expression se manifeste dans l’ensemble de l’existence physique et organique sur cette Terre, y compris en l’Homme lui-même.

Mais avant d’aller plus loin dans le « comment » de cette solidarité cosmique de l’être humain avec le zodiaque, qui, comme nous le verrons plus tard, ne se répercute pas seulement sur l’évolution du genre humain en général, mais aussi sur le développement de chaque individu humain, je voudrais encore ajouter une brève réflexion qui doit montrer que l’être humain n’est pas seulement un animal, comment, même à partir d’une pensée matérialiste, on arrive à des conclusions qui rendent presque certaine l’existence dans l’espace physique d’entités dépassant inconcevablement le niveau d’organisation de l’Homme, et que, selon l’expression de Schiller, seul l’œil « descellé » peut voir, de sorte qu’on pourrait presque parler d’une preuve matérialiste de Dieu.

Car si l’on peut considérer comme établi, dans le sens des enseignements de la science de la nature, que l’Homme s’est élevé, bien qu’en un laps de temps extrêmement long, du niveau d’organisation inférieur d’un être cellulaire jusqu’à sa hauteur actuelle, peu importe comment on peut expliquer cette ascension, on ne peut guère supposer [67] que cette évolution soit maintenant terminée pour toujours. Il faut au contraire supposer que les impulsions de cette évolution se poursuivent encore. La Terre n’a guère dépassé son âge « moyen »; elle existe peut-être déjà depuis quelques centaines de millions d’années, et cette ascension organique de l’Homme a peut-être duré plusieurs millions d’années jusqu’à aujourd’hui.

Ne peut-on pas supposer que dans quelques millions d’années, l’évolution de l’Homme sera arrivée à un point où l’organisation humaine sera peut-être aussi élevée au-dessus de son niveau actuel qu’elle l’a été, depuis cette époque lointaine, au-dessus du niveau des monères unicellulaires de Haeckel? — à  un niveau qui regarderait l’Homme d’aujourd’hui comme nous regardons le petit animal en infusion. Quelle force et quel pouvoir de connaissance posséderaient de tels êtres? Quelle imagination serait capable de le concevoir; si un tel être apparaissait soudain parmi nous, qui serait capable de le reconnaître, qui serait capable de le voir? Il est probable que l’Homme actuel, avec ses organes sensoriels, ne pourrait pas plus le reconnaître que les monères d’un homme ne pourraient percevoir ou reconnaître une forme! Ce serait inaccessible et inconcevable pour l’Homme d’aujourd’hui! Si nous ajoutons à cela que l’Homme possède déjà depuis longtemps des connaissances, même si elles sont encore très rudimentaires, qui lui permettent dans une certaine mesure d’intervenir dans le déroulement organique du processus de la vie et de collaborer ainsi consciemment à son évolution — quelles  perspectives immenses s’ouvrent alors! Peut-être que d’ici là, l’Homme aura déjà appris depuis longtemps à transformer la matière de son corps — voire  à quitter la Terre elle-même à volonté… Comparés aux Hommes d’aujourd’hui, nous ne pouvons pas qualifier de tels êtres autrement que comme des dieux! [Laurent alexandre sort de ce corps!] Et de tels êtres ne devraient-ils pas déjà exister quelque part sur des mondes lointains, dans des systèmes solaires plus anciens de plusieurs millions d’années que notre Terre!

En vérité, la pensée matérialiste devrait se renier elle-même si elle n’approuvait pas cette possibilité, si elle ne la considérait pas comme mille fois plus probable que le fait que l’évolution soit achevée pour toujours lorsque l’on atteint le stade humain!

Nous voulons aujourd’hui faire un pas essentiel au-delà de ce dont nous avons parlé la dernière fois.

Aujourd’hui, nous ne voulons pas étudier les forces motrices de l’évolution, mais essayer de connaître le processus de développement lui-même et sa relation avec le zodiaque — [68] essayer de comprendre le développement comme une transformation vers le haut ou, en d’autres termes, considérer les phases de ce développement ascendant de manière alchimique!

Si nous nous souvenons que l’Homme est l’héritier des trois cycles de la vie — des trois règnes minéral, végétal et animal qui se trouvent au-dessous de lui dont il est l’extraction — qu’il porte en lui comme son patrimoine héréditaire pour l’unir à ce qui l’élève maintenant au-delà de la dernière de ces étapes de vie, comme quatrième étape de vie, pour former l’unité de « l’Homme » — alors  nous comprendrons sans autre considération que cette quadruple articulation doit être contenue dans la vision directe du zodiaque, tel qu’il se présente au regard ésotérique.

C’est cette quadruple structure qui, dans les anciennes conceptions alchimiques, apparaît comme la doctrine des quatre éléments ou des quatre degrés d’existence sur cette Terre, que l’Homme perçoit en dehors de lui et qu’il ressent en même temps en lui! C’est ainsi que, selon une tradition très ancienne, les douze régions du zodiaque se présentaient dans un ordre particulier, correspondant à une échelle à trois degrés qui se répétait trois fois et qui était donnée par la succession des quatre éléments des alchimistes, le feu, la terre, l’air et l’eau:

Bélier, Taureau, Gémeaux, Cancer, Lion, Vierge, Balance, Scorpion, Sagittaire, Capricorne, Verseau, Poissons

représentent trois séries de quatre membres, chacune commençant par le Feu (Bélier, Lion, Sagittaire) et passant par la Terre (Taureau, Vierge, Capricorne) et l’Air (Gémeaux, Balance, Verseau) pour arriver à l’Eau (Cancer, Scorpion, Poissons) [voir illustration qui sera donnée dans la 5e conférence].

Pour le rationaliste, la pensée de Volney peut sembler artificielle, voire même le nombre de douze sections du zodiaque lui-même. Nous ne parlerons pas encore aujourd’hui de ce dernier.

Mais en réalité, l’ordre des sections du zodiaque est aussi peu artificiel que l’ordre des couleurs de l’arc-en-ciel dans le spectre solaire. Et de même que l’ordre des couleurs dans la bande spectrale fait apparaître directement dans la sensation une loi plus profonde, qu’il est même une expérience intérieure en tant que sensation de couleur, de même l’ordre des sections du zodiaque dissimule une loi qui apparaît d’abord à la conscience ésotérique comme l’échelle d’un spectre, qui ne représente toutefois pas une échelle de sensations de couleurs, mais de sensations de vie.

[69] N’est-ce pas Goethe lui-même qui a défendu l’idée que les couleurs dans leur ensemble ne représentent que des opacités de la lumière originelle uniforme, qui, non opacifiée, devrait rester insaisissable et invisible pour l’Homme. La lumière céleste se réfracte sur le prisme de la matérialité terrestre.

De même, ce qui rayonne sur la terre à partir du zodiaque constitue une sorte de lumière originelle dans l’esprit, qui n’est saisissable pour l’Homme que dans une échelle d’opacités qui résulte du fait qu’elle se réfracte sur la matière terrestre, c’est-à-dire qu’elle ne peut être reconnue dans le miroir de la conscience humaine qu’à travers le prisme de son niveau d’organisation. Et ce prisme est la constitution de vie intérieure de l’Homme, qui porte en lui les représentants de ces quatre règnes en tant qu’appareil de réception quadripartite des radiations zodiacales célestes. Il porte également en lui les quatre éléments que les alchimistes appelaient le Feu, la Terre, l’Eau et l’Air.

Nous sommes ainsi parvenus au seuil du secret alchimique lui-même.

Dans le peuple, on appelle volontiers l’alchimie l’art de faire de l’or.

Mais pour les Anciens, l’or — l’aurum — n’était que le symbole matériel de ce que la Bible désigne dès le premier chapitre comme l’aur, la Lumière originelle qui n’est perceptible à l’œil humain que de manière trouble et qui n’est reconnaissable intérieurement qu’à travers le milieu actuellement encore confus du stade humain. Le véritable art de l’orfèvre consisterait maintenant à transformer ce trouble de telle sorte qu’il devienne toujours plus lumineux et plus clair, jusqu’à ce qu’il soit en mesure de recevoir et de renvoyer l’unique rayon spirituel de la Lumière originelle dans toute sa pureté. Dans ce sens, essayons d’abord de comprendre comment ces quatre éléments de l’alchimie et leur transformation doivent être compris!

Source: Das Testament der Astrologie, tome 1, Oskar Adler, 1930-38

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