2.4.2. Le Signe du Scorpion

Nous nous tournons maintenant vers la modalité fixe de la triplicité de l’Élément Eau: le Signe du Scorpion.

Ce n’est pas le rayonnement, mais l’accumulation des radiations émises par cette partie du zodiaque qui devient la caractéristique essentielle du Scorpion L’accumulation jusqu’au plus haut degré possible de tension intérieure, de sorte que les énergies psychiques ainsi enrichies se condensent en un réservoir de force, contrairement au d, dont l’action présente cependant, conformément au caractère du signe du Scorpion, des traits tout à fait négatifs.

Le processus ainsi mis en place dans le domaine de l’âme ressemble à l’effet d’aspiration d’une pompe. Le Scorpion est incomparable [226] dans l’aspiration des forces de l’âme qui, une fois absorbées, ne peuvent tout d’abord pas être utilisées dans le monde extérieur. Mais il en résulte déjà quelques conclusions très importantes qui nous permettent de jeter un regard assez profond sur l’âme de ce type d’Homme.

Lui aussi, en tant qu’Homme aquatique, n’a pas de corps physique dans lequel le rayonnement pourrait pénétrer directement, lui aussi est d’abord étranger au monde réel et en est détourné. Lui aussi doit se créer une enveloppe qui protège la nudité de son corps-âme. Lui aussi puise cette enveloppe dans les courants de l’âme des personnes de son environnement. Mais alors que le Cancer cherchait en suppliant auprès de cet environnement une protection de l’âme, le Scorpion est doté d’une capacité qui lui permet de s’approprier les forces de l’âme des Hommes qui l’entourent et de les déposséder eux-mêmes en un certain sens, voire de les placer eux-mêmes vis-à-vis de lui dans la situation de ceux qui ont besoin de protection, après leur avoir retiré les forces qui font maintenant de lui le plus fort. Cette force qui semble émaner du h est passablement étrange. Si l’on voulait utiliser une image pour caractériser le rapport que le h entretient avec son environnement, on pourrait parler de vampire ou de sangsue.

Mais de telles images ne vont pas au fond du problème du Scorpion. Si nous constatons tout d’abord les caractéristiques extérieures des relations avec les personnes de l’environnement, telles qu’elles se présentent dans la vie du h, nous trouvons celui-ci le plus souvent entouré d’un groupe de personnes qui, comme par un charme secret, ont dû venir à lui pour lui donner la nourriture de l’âme – se laisser déposséder de leur âme – et il convient d’insister particulièrement sur ce point, se sentir heureux dans ce rôle, comme si on leur donnait, alors qu’ils sont eux-mêmes les donneurs. Ces personnes se placent ainsi d’emblée dans une relation d’obéissance, sans en ressentir le poids. Les forces qu’ils mettent ainsi à la disposition du h leur reviennent de telle sorte que la relation de dépendance, qui est évidemment réciproque, se maintient et se renforce constamment. D’un point de vue physique, on pourrait parler d’un système d’ondes « stationnaires » ou considérer le cercle humain, au centre duquel trône l’âme du h, comme une sorte de réflecteur géant, dont la force de rayonnement, rassemblée en un point, permet aux surfaces réfléchissantes de se recharger sans cesse, afin d’augmenter continuellement l’effet global et de s’épuiser finalement dans [227] l’œuvre éblouissante d’un prétendu « perpetuum mobile » psychique.

La véritable énergie qui alimente ce processus de régulation est la faim de l’âme, que la prédisposition du Scorpion procure. Mais peut-on être rassasié par des aliments qui n’alimentent que la faim et non le corps? Dans les Proverbes des Pères, il est question d’une chose qui devient d’autant plus affamée qu’on lui donne à manger.

La force la plus puissante du Scorpion est cette force de son « désir », qui atteint ici un degré d’intensité si singulier que nous devons, pour la caractériser un tant soit peu, lui donner un nom particulier. Nous voulons l’appeler la « force magique du désir », et nous nous trouvons ainsi devant la véritable énigme de la disposition du h. Nous nous rapprochons peut-être le plus de l’essence de cette force mystérieuse si nous partons de l’organe correspondant au Signe du Scorpion: l’organe sexuel. C’est là que ce que nous avons appelé la force magique du désir se transforme en force d’attirer d’abord des êtres du sexe opposé et de les maintenir sous son emprise, de les rendre pour ainsi dire sexuellement asservis et de se sentir augmenté par la conscience d’un tel pouvoir.

Nous appellerons ce type de magie la magie sexuelle. Par analogie avec cette magie naturelle qui est inconsciemment propre à tous les Hommes et à tous les animaux, nous allons essayer de clarifier en quoi peut consister l’essence de la force du Scorpion en tant que telle, qui est profondément apparentée à cette magie sexuelle. Ces forces s’étendent profondément dans le cosmique; elles forment les deux pôles de la sexualité dans le monde incarné, dont l’origine est à chercher dans la division originelle de l’Un en Deux. Tous les êtres appelés à participer à l’œuvre continue de la Création ne peuvent accomplir leur tâche que grâce à ces forces. Ce qui contraint les animaux et les Hommes, lorsqu’ils sont appelés à se reproduire, avec une puissance inexplicable, c’est la magie de cette force originelle de l’acte de révélation, du mystère sans cesse renouvelé de la vie elle-même. Il est donné aux organes sexuels de toutes les créatures vivantes d’être les dépositaires de ces forces.

Mais pour nous faire une idée de la manière dont cette dignité se présente au sein de l’âme animale de l’Homme, il est peut-être plus prometteur de partir de l’animal dont le nom du Signe céleste est affublé: le scorpion ou l’araignée.

[228] L’araignée a « posé sa toile » – elle ne la quitte pas, elle ne part pas à la chasse; attirées par quelque chose qu’elles ne comprennent pas elles-mêmes, les mouches se prennent dans cette toile pour y être aspirées par l’araignée.

Mais ce n’est pas pour cette raison que la comparaison avec l’araignée devrait être choisie. Si nous prenons la toile de l’araignée comme symbole du pouvoir magique de retenir une victime et que nous transposons le tout dans la vie sexuelle de l’araignée, nous avons devant nous quelque chose d’étrangement effrayant. Si l’araignée mâle s’est approchée de l’araignée femelle – en raison de cet instinct primaire –, elle le tue sans ménagement après l’acte d’union et le vide de son sang! Il est rare qu’une araignée mâle s’en sorte.

L’écrivain allemand Hans Heinz Ewers a réussi de manière inégalée à traduire l’aspect animal de ce processus en termes humains, et ce dans la nouvelle « L’araignée » du recueil Les Possédés. Dans d’autres nouvelles, plus tardives, cet écrivain traite également à plusieurs reprises de l’énigme du Scorpion, dont le contenu est en fait le mystère de la sexualité elle-même, qui représente le type « pur » de ce Signe; sauf que nous devons absolument chercher les manifestations de cette force de la sexualité dans le seul domaine psychique. Nous devons donc les transférer du domaine physique, où elles nous sont le plus familières, dans le domaine purement psychique. Il en résulte à nouveau quelques conclusions très importantes.

Ce qui se passe d’abord dans le physique par la force de la sexualité, c’est l’activation de la mémoire héréditaire, que le Scorpion nous a déjà appris à connaître. L' »hérédité », par laquelle les descendants sont amenés, du point de vue physique, dans la classe d’organisation des ancêtres, est en quelque sorte une suggestion secrète, agissant de manière organique, qui est donnée au germe endormi, qui commence alors à se développer conformément à cette suggestion. La force qui émane du h ressemble à une telle force de suggestion, qui s’empare des âmes des Hommes tombés sous son emprise et les place dans une « obéissance héréditaire » inconsciente, si je puis utiliser cette expression – dans l’état d’un « mimétisme » qui leur est imposé et qui les incite à s’assimiler psychiquement à l’image sous laquelle le natif du h leur apparaît; Ewers a également su magistralement présenter ce trait. Nous pouvons parler ici d’un mimétisme « actif », par opposition [229] au mimétisme « passif » que nous avons décrit comme caractéristique de la prédisposition au d. L’expression « vos désirs sont des ordres » exprime peut-être le mieux la manière dont nous devons nous représenter ce processus dans l’inconscient, à quoi s’ajoute le fait que le désir, qui devient ici un ordre, reste lui aussi généralement tout aussi inconscient.

Le Scorpion possède donc à un haut degré la capacité de marquer de son empreinte le cercle qu’il domine. Mais il apparaît déjà clairement que l’on peut faire un usage très différent de cette force dangereuse, une fois qu’elle est reconnue, et que cet usage permettra surtout de distinguer facilement le type moins développé du type plus développé du h. Le nom d' »aigle » que porte ce Signe dans la Bible sert précisément à caractériser ce type supérieur. Mais pour comprendre cela, nous allons d’abord opposer le Scorpion féminin et le h masculin, conformément au caractère sexuel de ce Signe, et ce parce que, conformément à la signature féminine de base de l’Homme aquatique, les traits du type moins développé se présentent beaucoup plus souvent chez la femme en « culture pure », tandis que les traits du scorpion plus développé se rencontrent plus souvent chez l’homme.

C’est pourquoi le modèle du type inférieur est toujours de nature féminine – même s’il s’agit d’un homme, et vice versa; en d’autres termes, il s’agit dans ce cas presque toujours de femmes des deux sexes, donc soit de femmes masculines, soit d’hommes féminins.

La « femme démoniaque », si souvent décrite dans la littérature, appartient avant tout au premier type. Au milieu d’une véritable cour d’âmes soumises, elle trône comme la « maîtresse » que tous considèrent comme une distinction de pouvoir servir. Il en résulte naturellement un sentiment accru de sa propre valeur, une envie naïve et de toute sorte de flatterie et de succès auquel le natif veut croire, mais surtout une soif de reconnaissance qui peut, dans certaines circonstances, atteindre des degrés pathologiques. Très vite, il s’avère que cette soif de succès entraîne une sorte d’envie de chasse qui, dans le domaine érotique, prend la forme d’un désir insatiable dont le but est uniquement d’augmenter son propre sentiment de puissance et non l’objet en question. Une fois celui-ci capturé, l’intérêt pour lui disparaît et se tourne vers un autre, pas encore conquis. C’est ainsi que se développent inévitablement, à partir de ce comportement, des caractéristiques qui apparaissent d’abord sur le plan de ce jeu érotique et qui représentent l’exact [230] contraire de ce que nous avons reconnu comme étant si caractéristique de la nature b: L’infidélité, l’irrévérence, l’ingratitude ou – exprimons-le en termes généraux – le manque de mémoire morale. Le refus d’assumer une quelconque responsabilité, par exemple dans le sens de l’Homme de l’Élément Terre. C’est une caractéristique qui ne fait presque jamais défaut à la nature de désir agitée du type Scorpion.

Le monde ne s’agite-t-il pas dans tous les sens,

Et ne dois-je pas tenir une promesse?

fait dire Goethe – dans l’horoscope duquel, outre le Signe de la f, le Signe du Scorpion jouait un grand rôle – à son Faust.

Et à quoi ressemblent les souhaits qu’il fait exprimer à Méphisto?

Un jeu où l’on ne gagne jamais.

Montre-moi le fruit qui pourrit avant d’être cassé,

et les arbres qui renaissent chaque jour!

On peut dire la même chose de la femme démoniaque que du male démoniaque, dont le type serait cependant Don Juan, pour autant que nous le traduisions dans l’absolu de l’âme.

Le besoin accru de reconnaissance dont nous venons de parler entraîne souvent des conséquences qui, lorsque le succès souhaité n’est pas au rendez-vous, conduisent à certains phénomènes compensatoires – de préférence: la transformation d’échecs en succès et la tendance à présenter des succès réels mais insignifiants comme importants pour soi-même et pour les autres. La tendance à se glorifier soi-même n’est presque jamais absente.

Il est inévitable que la forte consommation des forces de l’âme d’autrui, qui se produit au cours de la vie du Scorpion, provoque de graves blessures qui, à leur tour, passent inaperçues pendant un certain temps pour celui qui les a infligées. Mais si, plus tard, les forces du Scorpion commencent à diminuer ou même à s’éteindre, sans que l’on ait réussi à amener les « énergies sexuelles » à un niveau supérieur ou à les transformer, on voit souvent leurs porteurs devenir très malheureux; ils peuvent alors souffrir des blessures qu’ils avaient infligées aux autres avec leur « aiguillon », comme si cet aiguillon s’était maintenant retourné contre eux.

Ici, seule une transformation des forces magiques originelles de désir peut aider, de telle sorte que leur effet soit inversé [231]. Il ne s’agit pas de nourrir sa propre âme avec les forces nutritives que l’on retire aux autres, mais d’utiliser les forces de l’âme accrues, maintenant transformées intérieurement, de telle sorte qu’elles ne soient plus aptes à infliger des blessures, mais à guérir les blessures. Les forces de suggestion, qui servaient auparavant à des fins purement égoïstes, sont alors dépouillées de leur égoïsme et mises au service de l’amour désintéressé qui guérit.

Cela nous révèle la vocation essentielle du Scorpion évolué – d’abord sous la forme du médecin au sens le plus large du terme –, l’Homme dont émanent les forces de guérison.

Attardons-nous un peu sur cette idée.

Pour comprendre les forces inférieures du Scorpion, nous sommes partis auparavant du type de la femme démoniaque. Pour comprendre les forces supérieures du Scorpion, partons maintenant du type de l’homme – non pas de l’homme démoniaque, mais de l’homme dont les forces sexuelles magiques sont devenues des forces de guérison. Des forces sexuelles émanent également de ce type, mais elles n’agissent pas dans l’érotisme. Elles sont peut-être à comparer au mieux avec ce que Gustav Jaeger appelle la force de la supervirilité ou la force de la surmortalité, par laquelle s’établit entre le porteur et celui qui en bénéficie, au sens figuré du terme, une relation semblable à celle qui existe entre la « femme démoniaque » et les victimes qui lui sont soumises, sauf que les forces qui sont ici à l’œuvre deviennent des forces-guides, auxquelles il est donné d’inoculer aux autres, pour ainsi dire, le vaccin – le vaccin occultant du degré supérieur obtenu par leur propre transformation – et de les façonner ainsi à son image, comme par la force ennoblissante d’un mimétisme actif agissant magiquement!

Le Scorpion évolué possède également le don de fascination – le don de captiver. C’est de lui que part la formation de l’image idéale que le cercle qu’il domine accueille comme une impulsion de développement agissant de manière organique et dont l’effet rajeunissant permet aux énergies vitales qui s’essoufflent de se redresser sans cesse!

Et de même que des organes sexuels eux-mêmes, au sein de l’organisation de notre corps physique, émanent les forces qui le régénèrent sans cesse, de même la tâche du Scorpion évolué devient de devenir une fontaine de jouvence pour l’humanité elle-même, dans la mesure où il en est capable!

[232] Il n’est guère nécessaire d’expliquer en détail de quelle manière le Taureau et le Scorpion se complètent mutuellement.

La planète affectée au Signe du Scorpion est Mars. Sans préjuger des études ultérieures sur la nature et le caractère astrologique du rayonnement de Mars, il convient de souligner que nous sommes ici en présence d’une énergie Planétaire qui forme un contraste marqué avec le principe de Venus, Planète attribuée au Taureau. Si Venus était pour nous le représentant de l’éternel féminin, de l’âme ouverte à l’impulsion supérieure dans la nostalgie et l’humble attente, Mars est le représentant de toutes les énergies actives, poussées vers l’extérieur, ou de l’expansion – de l’élargissement du champ d’action.

Si nous nous en tenons maintenant au glyphe symbolique du Signe Planétaire E et de celui du Signe du Scorpion, nous reconnaissons dans les deux images une sorte de pointe, de flèche qui peut peut-être nous rappeler le « dard » du scorpion, là « l’instrument de guerre » en général. Mais de même que l’aiguillon venimeux du scorpion peut se transformer, dans la main du médecin, en aiguille d’injection du sérum guérisseur, de même la flèche Martienne, dans le sens de la force du h supérieur, peut se transformer en symbole d’une mort volontairement acceptée de la vie passionnelle inférieure, qui doit mourir en nous pour renaître en tant qu’amour supérieur, désintéressé, suprasensible, guérisseur!

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