La démonstration est un élément très important du discours. L’auditeur veut savoir pourquoi les choses se comportent ainsi ou pourquoi l’orateur veut changer l’état actuel des choses; il veut connaître les raisons impérieuses et le contexte de nos déclarations; il veut voir des « chaînes de causalité »: cause, effet, fondement et division, etc. Seul le démagogue se contentera de marteler ses affirmations aux auditeurs sans apporter de preuves concluantes.
En rhétorique, il existe deux types de preuves fondamentales: la preuve absolue ou apodictique et la preuve relative (question d’appréciation!). Apodictique signifie irréfutable, intouchable, ne tolérant aucune contradiction.
Même si j’apporte une multitude de raisons et de preuves qui parviennent à convaincre plus d’un auditeur, il reste toujours la possibilité que mon adversaire parte d’une autre hypothèse de base ou procède à une autre interprétation. Dans de nombreux cas, je ne peux offrir qu’une « preuve relative ».
Dans de tels cas, cherchons toujours à clarifier au préalable les présupposés, les concepts et les critères sur lesquels se base notre contradicteur. Si, comme c’est souvent le cas, ces points ne sont pas clarifiés, la discussion tourne en rond, ne fait pas sens.
Deux voies de démonstration s’offrent à nous: La déduction et l’induction. La preuve déductive mène du général au particulier. La preuve inductive mène du particulier au général.
Le raisonnement par analogie, souvent utilisé, est tout aussi souvent source d’erreur. On « prouve » des relations de cause à effet là où il ne s’agit que de pures coïncidences (par exemple temporelles). Il faut toujours se méfier des déductions apparemment logiques. La conclusion est-elle impérative ou seulement apparente? Réfléchissons-y à l’aide de cet exemple :
Toutes les oies ont deux pattes.
Démontrer la fausseté (ou la justesse!?) de cette énoncé – vous avez quatre heures!
Toutes les filles ont deux pattes.
Donc, toutes les filles sont des oies.
Les auditeurs cultivés préfèrent généralement la voie inductive, car ils veulent participer à la réflexion: la conclusion se développe en effet à partir d’une multitude de preuves individuelles. Lors de la démonstration, il faut particulièrement veiller à faire des « petits pas » et à n’omettre aucun maillon de la chaîne des déductions. Le raisonnement doit être dense. L’induction devra aussi être utilisée davantage parce qu’elle apporte plus de tension (au contraire de la déduction où le résultat final – la thèse que l’on soutient – est annoncé d’entré) Mais prenons garde, avec l’induction, à ne pas généraliser trop vite. Cette tendance ne s’impose que trop facilement!
Jamais juste, toujours important.
Erich Kästner, sarcastique sur la généralisation.
Souvent, des jugements à l’emporte-pièce, fondés sur des sentiments, sont émis parce que des opinions « courantes » ou des exemples isolés servent de base apparente. Nous devons toujours nous demander si notre jugement repose sur des faits ou des réflexions suffisamment nombreux. Il est très facile que la simple spéculation « l’emporte »!
Une autre erreur courante se produit avec l’argument circulaire, lorsque deux affirmations non prouvées sont avancées pour « prouver » avec l’une la validité de l’autre:
Ces personnes sont paresseuses parce qu’elles n’ont pas appris à travailler, et elles n’ont pas appris à travailler parce qu’elles sont paresseuses.
Souvent, nous avons plusieurs preuves fortes. Nous en mettons une forte en premier, les plus faibles (si tant est que cela soit nécessaire?!) au milieu, les plus fortes et les plus percutantes à la fin.
La règle antique selon laquelle il faut augmenter progressivement les raisons lors de l’exposé des preuves nous semble totalement inappropriée à notre époque. C’est psychologiquement faux. L’auditeur veut avoir un argument convaincant dès le début de la démonstration, sinon il n’écoute même pas les raisons suivantes.
Dans la démonstration, il faut se méfier d’un slalom mental extrêmement difficile. Les auditeurs ont souvent du mal à suivre.
Une dernière chose encore:
On ne soulignera jamais assez que ce qui est logiquement impératif peut être sans effet sur le plan oratoire. C’est pourquoi une preuve vaut souvent plus que plusieurs, et il n’est pas du tout nécessaire que celle-ci soit la plus forte logiquement; le point de vue selon lequel elle est choisie parmi d’autres, qui lui sont peut-être équivalentes, est celui du moment: la plus convaincante, celle qui a la plus grande force de frappe, est celle qui saute le plus aux yeux des auditeurs et contradicteurs spécifiques que vous avez devant vous.
Ewald Geißler
Il s’agit de mettre en avant cet argument principal de manière concise et convaincante dans la démonstration et de l’habiller de manière rhétoriquement efficace.