Tiré du Manisfeste conspi, pages :
Qui peut dire que, depuis deux ans, nous ne sommes pas systématiquement soumis à une succession de stimuli de peur visant à générer un état de régression docile, à un rétrécissement méthodique de notre monde, à des injonctions contradictoires visant à nous rendre suggestibles ? Tout n’est-il pas fait pour nous placer dans une situation de contre-pied existentiel nous rendant vulnérable à n’importe quel coup ?
« Prenez soin les uns des autres / mais fuyez-vous les uns les autres »
« Restez chez vous / mais allez travailler »
« Soyez responsables / mais laissez-nous faire »
« La situation est sous contrôle / mais elle peut nous échapper à tout moment »
« Faites-vous vacciner / mais le vaccin ne vous protège pas »
« Le virus est terriblement dangereux / mais il ne tue que les vieux- obèses-diabétiques-coronariens »
« Nous vous maltraitons / C’est pour votre bien »
« Faites-nous confiance / Nous vous manipulons »
« Visons l’immunité collective / Il n’y a pas d’immunité collective »
L’état induit de dissonance cognitive dissocie, comme prévu, groupes et sujets. À l’obéissance aveugle des uns répond la rétraction obsidionale des autres sur fond de paralysie intérieure. Il en résulte « le sentiment que la vérité est simplement impossible à connaître, et une attitude de résignation qui conduit à se retirer du débat politique et qui paralyse. Cette situation peut s’avérer utile aux puissants étant donné que ceux qui veulent changer les choses doivent convaincre les autres, tandis que ceux qui veulent rester au pouvoir n’ont qu’à les paralyser pour les empêcher d’agir. » (Zeynep Tufekçi, Twitter & les gaz lacrymogènes, 2019) Toutes les incertitudes du management de crise n’empêchent pas qu’il s’agisse bel et bien d’une expérience de management par l’incertitude. Et même de management par l’injonction paradoxale tel qu’on l’a vu apparaître dans les entreprises françaises, lors des séminaires internes de cadres, à la fin des années 1990. L’art consommé avec lequel les gouvernants ont entendu dresser les vaccinés contre les non-vaccinés peut être élevé au rang de cas d’école de la perversité en communication. Cela commença le 1er juillet 2021 par un « Je crains une forme de fracture entre ceux qui auront été vaccinés et ceux qui n’auront pas voulu se faire vacciner » du porte-parole du gouvernement. Suivit une interview téléphonée de Bernard Kouchner, le 11 juillet : « Ceux qui, face à ce virus, choisissent de se battre individuellement sont sinon des déserteurs, du moins des alliés du virus. La vaccination n’est pas un sujet personnel. La refuser, c’est une trahison. » Ces propos très Dark Winter intervenaient, sans surprise, la veille du coup de force du président de la République : son discours du 12 juillet visant à « reconnaître le civisme et faire porter les restrictions sur les non-vaccinés plutôt que sur tous ». Ou, pour le dire avec les mots de l’un de ses ministres-godillots, à « cogner sur les non-vaccinés [à qui] ça va coûter cher ». Une quatrième vague fantomatique et des arguments défiant toute raison, du genre « les non- vaccinés menacent de mort les vaccinés », servaient de paysage à ce chantage pur et simple : il faudrait désormais se soumettre à cette écœurante « vaccination », ou bien rester chez soi en perdant tout salaire et en renonçant à toute activité. Pour finir, on eut, au lendemain d’une manifestation contre le « pass sanitaire », le remarquablement retors « il ne faut pas se moquer des gens qui ont peur » du Premier ministre. Pas à pas, chaque discours aura fait le contraire de ce qu’il disait.
Le « but est de saper la perception du monde que peuvent avoir les gens afin qu’ils ne sachent jamais ce qu’il se passe réellement (…) C’est une stratégie de pouvoir qui maintient toute l’opposition dans une confusion permanente, un changement incessant imparable car il est indéfinissable. » (Adam Curtis, Oh dearism, 2009) La communication de crise adoptée depuis mars 2020 va plus loin que la toxicité ordinaire d’une société qui promeut l’autonomie et repose sur la soumission, qui serine à longueur de journée à ses soutiers qu’il faut manger sainement tout en leur retirant tout moyen de le faire, qui ne rate aucune occasion de rappeler qu’elle est un Titanic, mais pourchasse ceux qui tentent de quitter le navire. Toute cette « gestion de crise » du Covid relève de ce que le psychiatre Harold Searles nomme « l’effort pour rendre l’autre fou » : « L’instauration de toute interaction interpersonnelle qui tend à favoriser un conflit affectif chez l’autre – qui tend à faire agir les unes contre les autres différentes aires de sa personnalité – tend à le rendre fou (c’est-à-dire schizophrène), […] tend à saper sa confiance dans la fiabilité de ses propres réactions affectives et de sa propre perception de la réalité extérieure. » (L’Effort pour rendre fou, 1977)
Cela constitue d’après Searles un « équivalent psychologique du meurtre ». C’est cela que nous avons vécu, à une échelle de masse. Aucun code pénal ne nous en protégera jamais.