Jacques Attali, publié le 03/05/2009 à 12:16
L’Histoire nous apprend que l’humanité n’évolue significativement que quand elle a vraiment peur: elle met alors d’abord en place des mécanismes de défense; parfois intolérables (des boucs émissaires et des totalitarismes); parfois futiles (de la distraction); parfois efficaces (des thérapeutiques, écartant si nécessaires tous les principes moraux antérieurs). Puis, une fois la crise passée, elle transforme ces mécanismes pour les rendre compatibles avec la liberté individuelle, et les inscrire dans une politique de santé démocratique.
La pandémie [NDR: H1N1] qui commence pourrait déclencher une de ces peurs structurantes.
Si elle n’est pas plus grave que les deux précédentes peurs liés à un risque de pandémie (la crise de la vache folle de 2001 en Grande Bretagne et celle de la grippe aviaire de 2003 en Chine), elle aura d’abord des conséquences économiques significatives [NDR: pour quelles raisons alors?] (chute des transports aériens, baisse du tourisme et du prix du pétrole); elle coûtera environ 2 millions de dollars par personne contaminée et fera baisser les marchés boursiers d’environ 15% ; son impact sera très bref (le taux de croissance chinois n’a baissé que pendant le deuxième trimestre de 2003, pour exploser à la hausse au troisième); elle aura aussi des conséquences en matière d’organisation. – En 2003, des mesures policières très rigoureuses ont été prises dans toute l’Asie; l’Organisation Mondiale de la Santé a mis en place des procédures mondiales d’alerte; et certains pays, en particulier la France [NDR: avant de les brûler à quelques encablures de covide plandémie] et le Japon, ont constitué des réserves considérables de médicaments et de masques.
Si elle est un peu plus grave, ce qui est possible, puisqu’elle est transmissible par l’Homme, elle aura des conséquences véritablement planétaires: économiques (les modèles laissent à penser [NDR: Ah, les fameux modèles foireux de l’incapable Fergusson, déjà aux commandes du massacre des vaches lors de la pseudocrise de 2001] que cela pourrait entraîner une perte de 3 trillions de dollars, soit une baisse de 5% du PIB mondial) et politiques (en raison des risques de contagion, les pays du Nord auront intérêt à ce que ceux du Sud ne soient pas malades et ils devront faire en sorte que les plus pauvres aient accès aux médicaments [NDR: afin d’abaisser leur défense immunitaire naturelle] aujourd’hui stockés pour les seuls plus riches); une pandémie majeure fera alors surgir, mieux qu’aucun discours humanitaire ou écologique, la prise de conscience de la nécessité d’un altruisme, au moins intéressé [NDR: pour la gloire de BigPharma et des philanthropes satatnistes].
Et, même si, comme il faut évidemment l’espérer, cette crise n’est [pas] très grave, il ne faudra pas oublier, comme pour la crise économique, d’en tirer les leçons, pour qu’avant la prochaine, inévitable [NDR: pour la survie des bénéfices indécents des actionnaires et décideurs de BigPharma], on mette en place des mécanismes de prévention et de contrôle et des processus logistiques de distribution équitable des médicaments et de vaccins. On devra pour cela mettre en place une police mondiale, un stockage mondial et donc une fiscalité mondiale. On en viendra alors, beaucoup plus vite que ne l’aurait permis la seule raison économique, à mettre en place les bases d’un véritable gouvernement mondial. C’est d’ailleurs par l’hôpital qu’à commencé en France au 17e siècle la mise en place d’un véritable État.
En attendant, on pourrait au moins espérer la mise en œuvre d’une véritable politique européenne sur le sujet. Mais là encore, comme sur tant d’autres sujets, Bruxelles est muet.